Depuis tout petit, j’ai eu la chance de cohabiter avec plusieurs milieux naturels : construction de cabanes dans un grand jardin, découverte de l’océan, observation de la diversité des animaux, insectes, poissons. Au fil du temps, la curiosité c’est transformée en inquiétude pour la fragilité du vivant, et même en grande préoccupation devant la violence des destructions qui menacent la pérennité de nombreux écosystèmes.
Il m’est apparu progressivement que le cœur de l’organisation sociale actuelle réduit la nature à un ensemble de ressources inépuisables : l’objectif central de croissance économique est incompatible avec un monde physique fini, déjà bien détérioré et rendu très vulnérable par des décennies de dégradations. Aujourd’hui il s’agit de dépasser le stade des déclarations de bonnes intentions afin de remettre profondément en cause nos façons de vivre, travailler et consommer.
A titre individuel, j’essaie d’être le plus cohérent possible dans ma façon de consommer en général. Plus précisément, cela passe par une autoproduction et une autoconsommation (potager, arbres fruitiers), et une sobriété générale. En termes d’alimentation, cela se traduit par l’arrêt du gaspillage, la réduction des emballages, la suppression des produits transformés, et une consommation de produits non traités. Ma consommation de viande et de poisson est limitée. Je m’efforce de réduire et d’optimiser mes déplacements, mon alimentation, en faisant les choses au plus juste, avec mesure.
Pour ce qui concerne ma passion et mon métier, la voile, il y également une série de questions qui devraient nous guider individuellement et collectivement. La voile, bien qu’étant un sport propre, a toutefois un impact environnemental non négligeable : les technologies embarquées, l’impact du bateau à sa construction, les voiles, et tous les déplacements liés aux courses et aux entraînements. Il faut essayer d’allonger la durée de vie des produits : à coût égal je préfère réparer du matériel plutôt que d’en racheter du neuf. On doit moins consommer dans notre vie de terriens mais aussi dans notre vie de marins. J’ai souvent l’habitude de dire que j’ai l’impression de consommer l’océan. Comme à terre, sur la mer on est souvent un peu trop gourmands, on pense à la performance et on ne pense pas toujours au respect de la nature, de notre support qui est la mer, et qui est un formidable espace de liberté. Un espace de liberté qui a plus que jamais besoin d’être préservé, et l’équilibre nécessaire à atteindre devra passer par la pondération. En résumé, je pense que notre sport doit évoluer et se réinventer. J’essaie de réfléchir pratiquement à ce nouveau paradigme et d’avancer pas à pas dans cette voie.